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Semaine de 4 jours dans le service public

Etude sur la semaine de 4 jours dans le service public

Dans le cadre de notre étude sur la semaine de 4 jours dans le service public, nous sommes allés à la rencontre des employeurs qui ont osé expérimenter de nouveaux aménagements du temps de travail dans leurs institutions. 

Anne-Sophie PEYRET-ROSA, Chargée de mission QVT et cheffe de projet semaine de 4 jours, nous parle de l’expérimentation menée au sein de la Métropole de Lyon.

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Semaine de 4 jours dans le service public

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Le défi RH à relever ?

L’expérimentation d’une semaine de travail de 4 jours soulève des défis liés aux RH et à la qualité de vie au travail.

Nous sommes convaincus que l’attractivité RH passe notamment par l’amélioration de la qualité de vie au travail.

Avant tout, il s’agit d’améliorer la qualité de vie de nos agents. D’autre part, nous espérons que cela aura un impact positif sur notre attractivité et la fidélisation de nos collaborateurs.

Qui impulse la démarche en interne ? 

La Métropole de Lyon existe depuis 2015. Elle est le fruit d’une fusion de deux collectivités. Avant sa création, il préexistait dans l’une de ces collectivités, le département du Rhône, des modèles d’organisation du temps de travail sur 4 jours. Cette politique RH n’a pas pu être reprise  lors de la création de la Métropole de Lyon. Mais depuis, plusieurs partenaires sociaux ont manifesté leur désir de revenir à ce modèle.

La place du travail dans nos vies à été bouleversée.

En 2020, pendant la crise sanitaire, la place du travail dans nos vies a été bouleversée. Pendant la première partie du mandat de l’exécutif, le télétravail, l’équilibre entre vie professionelle et vie personelle, l’égalité femme-homme et plus largement les enjeux de qualité de vie au travail ont été au coeur de nos attentions. Assez naturellement, nous avons décidé de remettre le sujet de la semaine de 4 jours sur la table.

Les étapes clés avant le déploiement ?

Nous avons commencé par faire un benchmark. Il s’agissait de récolter des retours d’expérience de collectivités ayant des enjeux de continuité de service comparables aux nôtres. Nous nous sommes rendu compte que de nombreuses collectivités proposaient une semaine de travail en 4.5 jours et quelques-unes sur 4 jours, notamment depuis la Loi de Transformation de la Fonction Publique qui fixe la durée hebdomadaire de travail à 1607 heures annuelles. 

Une équipe projet pluridisciplinaire a ensuite été constituée avec des psychologues du travail, des spécialistes du temps de travail, des représentants des services d’accompagnement aux managers et à la transformation publique ainsi que des représentants RH. Dans un premier temps, leur mission a été d’échanger avec les directeurs de services afin de recueillir leurs attentes et leurs craintes. Il s’agissait également de réfléchir à un cadre pour lancer une expérimentation.  Ce travail en co-construction a permis d’en définir les grandes règles, dont voici une liste non-exhaustive  : 

  • L’expérimentation concerne les agents à temps plein et exclut les agents qui ont des temps de travail spécifiques ;
  • Le temps de l’expérimentation, les agents éligibles à temps partiel peuvent choisir de passer à temps plein ;
  • Les agents peuvent sortir du dispositif quand ils le veulent.

Sur la base des règles fixées, 5500 agents sur les 9000 qui composent notre effectif étaient éligibles à l’expérimentation. Sur cette base, environ ⅓ des services ont souhaité rentrer dans l’expérimentation. Les autres ont mis en avant un manque de recul sur les effets ou encore par des vacances de postes qui mettraient le service en péril.

L’expérimentation a été annoncée aux agents début 2023. En septembre, 300 agents de métiers très variés ont décidé, sur la base du volontariat, d’expérimenter la semaine de 4 jours. 

Quelles modalités ?

Les agents expérimentateurs ont eu le choix entre 4 options  : 

  • Une semaine de 4 jours / 35h sans RTT (8H45 de travail par jour) ; 
  • Une semaine de  4 jours / 36h avec 5 RTT (9h de travail par jour) ;
  • Une semaine de 4 jours / une semaine de  5 jours (8h  de travail par jour) ;
  • Une semaine de 4 jours et demi 

Nous leur laissons la possibilité de changer d’option 1 fois au cours de l’expérimentation. Les agents ont eu la possibilité de choisir leur jour “off”. Par contre, une fois fixé, ce jour doit être le même durant toute la durée de l’expérimentation. 

La grande majorité de nos collaborateurs ont choisi les options 2 et 3. Et sans grande surprise, le jour “off” le plus plébiscité est le vendredi, suivi du mercredi.

Quelle communication ? 

Pour ce qui est de l’information interne, un espace dédié a été créé sur notre intranet. Il regroupe les règles et le cadre de l’expérimentation mais aussi un simulateur de congés ainsi qu’une foire aux questions. Des sessions de formation ont également été réalisées auprès des managers.

Concernant les candidats, nous avons fait le choix de ne pas mentionner l’expérimentation dans nos offres d’emploi puisque nous en sommes encore au stade de l’expérimentation. En revanche, les managers peuvent en parler lors des entretiens.

Les difficultés rencontrées ?  

Globalement, nous sommes très satisfaits. Les délais ont été rapides mais nous avons ressenti tout de suite de l’enthousiasme de la part des responsables de services et de la part des collaborateurs. La plus grande difficulté à laquelle nous faisons face concernerait finalement un déploiement généralisé.

En effet, si nous pérennisons le dispositif à la fin de l’expérimentation, nous devrons anticiper un potentiel besoin d’accompagnement de certains collectifs sur sa mise en œuvre, le passage des modalités d’expérimentation aux définitives pour les expérimentateurs (notamment si les scénarii proposés évoluent). Et se posera également la question des métiers qui actuellement ne sont pas éligibles. Il s’agit des métiers ayant des aménagements spécifiques de leur temps et organisation du travail, en lien avec les missions qu’ils effectuent. Je pense, à titre d’exemple, aux équipes chargées de la collecte des déchets ou aux collaborateurs qui travaillent sur un rythme en 3X8 ou en 2×8. Certains sont déjà sur des semaines de 4 jours. Si la collectivité envisageait d’étendre le dispositif à ces métiers, il faudrait envisager de nouvelles organisations du temps de travail, qui prennent en compte une grande variété de contraintes et de modes d’organisation.

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Semaine de 4 jours : les grands enseignements 

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Quels résultats ?

L’expérimentation a débuté en septembre. De fait, nous n’avons que très peu de recul. Par contre, nous avons identifié, en co-construction avec les syndicats, les indicateurs de suivi qui nous permettront de tirer les premiers enseignements (impact sur la qualité de vie, continuité de service, qualité du service public, absentéisme…). Il s’agit également d’évaluer la faisabilité d’une pérennisation. A l’heure actuelle, nous pouvons dire que la dynamique de lancement est positive puisque le nombre d’agents expérimentateurs augmente. 

La semaine de 4 jours, c’est faire le pari de la souplesse. 

Le premier axe de questionnement qui émerge vise à apporter plus de flexibilité pour fixer le jour non travaillé dans la semaine. La semaine de 4 jours, c’est faire le pari de la souplesse. Dès lors, il faudra voir s’il est nécessaire ou non de permettre aux collaborateurs de changer de jour d’une semaine sur l’autre.

Un premier bilan sera dressé en mars. Il pourra conduire à des ajustements, à la poursuite ou à l’arrêt de l’expérimentation.

Les facteurs de réussite et d’échec ?

Pour l’heure, la réussite du lancement tient au fait que l’expérimentation est le fruit d’un désir partagé entre l’exécutif, les services et les organisations syndicales. 

L’expérimentation est le fruit d’un désir partagé entre l’exécutif, les services et les organisations syndicales.

Cette impulsion collective a pour résultat un pilotage fluide et coordonné. Pour identifier les facteurs de réussite et d’échec d’une globalisation du dispositif, nous prévoyons d’interviewer les expérimentateurs, les managers et nos collègues qui n’ont pas souhaité rejoindre l’aventure.

Un conseil ?

Il ne faut pas avoir d’a priori sur les rythmes qui vont le mieux correspondre aux collaborateurs. On ne connaît pas les situations personnelles de nos collègues. En faisant le choix de la semaine de 4 jours, nos organisations publiques doivent développer une culture managériale basée sur la confiance et la flexibilité. Nos collaborateurs sont les mieux placés pour organiser leur temps de travail de sorte à trouver un équilibre alliant confort et efficacité. Passer par l’expérimentation leur permet de réfléchir au rythme qui leur correspondra le mieux. Ce temps de maturation est important car la semaine de 4 jours à un fort impact dans nos organisations de vie.

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Découvrez l’ensemble des retours d’expériences des institutions qui expérimentent la semaine de 4 jours dans le service public : dans notre étude.

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