Olivier Malaguarnera est directeur de projets transformation numérique au sein du Département de l’Essonne. Dans cet entretien, il nous parle de l’importance de mettre le numérique au service de la transformation des métiers, des organisations et de l’efficience du service public.
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Je suis directeur de projets sur les sujets de transformation numérique. Mes missions transverses s’articulent autour de trois axes : le pilotage d’un portefeuille de projets d’évolution numérique, la transformation numérique des métiers, l’amélioration continue par une acculturation à la gestion de projets.
Mon métier est celui d’un chef d’orchestre qui s’accorde avec l’ensemble des partenaires, internes et externes, pour trouver le bon tempo et proposer la bonne musique. Je veille à ce que la trajectoire numérique du département soit portée dans l’ensemble des directions opérationnelles de la direction générale adjointe dans laquelle j’exerce mes missions et qui regroupe environ 1500 agents. Culture, éducation, sport, jeunesse, sécurité, archives, tourisme… autant de domaines d’actions différents à investir.
Les projets que je pilote sont des projets humains avant d’être des projets techniques.
J’accompagne également les métiers dans leur évolution et l’expression de leurs besoins. Lorsque l’on introduit un nouvel outil numérique ou que l’on dématérialise certains process, j’analyse les impacts sur le métier. Les projets que je pilote sont des projets humains avant d’être des projets techniques. Il s’agit d’identifier les changements à venir pour accompagner l’innovation, le changement dans les outils, les usages et les nouvelles pratiques numériques. J’élabore à ce titre une véritable stratégie d’accompagnement au changement adaptée en fonction de chaque situation.
Enfin, il s’agit d’insuffler une méthodologie de projets en accompagnant les chefs de projet métier à chaque étape (diagnostics métiers, expression des besoins, cadrage du projet, rédaction du marché public, planification, suivi budgétaire, accompagnement au changement, etc.).
Faire en sorte que l’outil numérique corresponde aux besoins métiers dans une organisation adaptée.
Le service public est dans un moment de grandes transformations. A l’instar des nouvelles habitudes de consommation en ligne, les usagers souhaitent toujours plus de réactivité et de rapidité. Dans ce contexte, la transformation numérique doit tirer le meilleur des outils numériques dans une organisation adaptée. Il s’agit d’améliorer le quotidien des agents et l’efficacité du service public.
La transformation numérique c’est utiliser le meilleur des outils numériques dans une organisation adaptée.
L’outil numérique n’est pas une baguette magique. C’est pour cela que j’accorde une grande attention à l’expression du besoin et aux processus en place. Avant de développer un nouvel outil numérique, nous devons revoir nos modes d’organisation. Avec le numérique, tout le monde doit être gagnant : les usagers et les agents publics qui traitent les demandes.
La réduction des coûts de fonctionnement est également un enjeu majeur. Il ne s’agit pas de supprimer des postes mais de réorganiser le travail pour gagner en efficacité en supprimant les tâches à faible valeur ajoutée.
Enfin, il me paraît indispensable que nous nous posions systématiquement la question de l’impact ou de la plus value environnementale de nos projets numériques.
Dans mon métier, avant tout, il faut de solides connaissances en méthodes projets, qu’elles soient classiques ou agiles. Il faut être curieux et avoir un côté “intrapreneur” pour proposer de nouvelles idées. Cela implique aussi d’établir une relation de confiance avec les équipes. Enfin, il faut avoir un grand sens de l’écoute afin de clarifier le besoin réel. Dans un projet, il y a souvent un besoin affiché et un besoin inavoué à aller chercher.
J’ai exercé dans le domaine des systèmes d’information pour des grands groupes, hôteliers et bancaires notamment. Nous suivions des logiques boursières et des ambitions de rentabilité. Quand je rentrais chez moi le soir, je m’interrogeais : mon travail est à destination de qui ? Pourquoi ? J’étais en perte de sens et j’avais besoin de travailler sur des projets concrets. Dans la poursuite de ces questionnements, je me suis dis que j’avais envie d’être acteur de mon territoire et de m’engager sur mon bassin de vie. Assez logiquement, j’ai regardé les offres sur le site web de la collectivité sur laquelle j’habite.
Choisir le service public, c’est travailler sur des projets qui ont un impact concret dans notre vie personnelle.
Choisir le service public, c’est travailler sur des projets qui ont un impact concret dans notre vie personnelle. A titre d’exemple, mon fils est collégien et je travaille sur les outils mis à la disposition des enseignants, des agents du département, des élèves et leurs parents dans les collèges. J’ai été président d’une association sportive et je travaille sur des téléservices qui ont vocation à faciliter l’accès aux subventions pour le tissu associatif local. Il n’y a pas plus concret que cela. Le principe d’être à la fois concepteur et usager est essentiel pour moi !
Ce qui me démotive parfois, c’est l’inertie dans la fonction publique et la lourdeur administrative. Et ce qui me motive, c’est justement de contribuer à l’amélioration de ces procédures pour les rendre plus fluides.
Dans le secteur public, je vois beaucoup d’envie.
Dans le secteur public, je vois beaucoup d’envie. Fédérer cette énergie et aller chercher les personnes moteur pour impulser des dynamiques de changement, c’est très motivant.
Je pense à un projet que nous menons pour réduire la fracture numérique pour les agents publics qui travaillent dans les collèges. Ces agents sont souvent assez éloignés du numérique. Ils sont également par définition éloignés physiquement du siège départemental et, ils n’ont pas forcément toujours accès simplement à l’intranet par exemple. Nous avons donc travaillé pour leur ouvrir des accès sécurisés à distance à cette communication et les services associés, les doter de moyens matériels dans les collèges et surtout les accompagner dans ces nouveaux usages.
Tous les projets qui concernent l’intégration de l’intelligence artificielle dans nos processus m’intéressent. On commence à en parler au niveau de l’Etat mais encore peu dans le monde des collectivités locales. L’IA va avoir un impact énorme dans l’avenir du service public et sur la transformation de ses métiers.
L’IA va avoir un impact énorme dans l’avenir du service public et sur la transformation de ses métiers.
Ce qui me fait peur, c’est que j’ai le sentiment que l’on ne l’appréhende pas aussi rapidement que l’on devrait le faire.
A notre échelle, nous avons engagé une réflexion sur l’utilisation d’un outil qui permettra d’optimiser le choix des leviers de remplacement en cas d’absence dans les collèges. L’intelligence artificielle pourrait proposer le levier de remplacement le plus approprié au cas de figure de l’absence.
Garder en tête qu’il faut systématiquement savoir écouter, analyser, s’adapter et proposer !