Nous sommes allés à la rencontre d’Emmanuel HUSSON. Emmanuel a postulé il y a quelques mois à une offre d’emploi publiée sur notre plateforme et a été retenu pour le poste !
Il est aujourd’hui chargé de mission auprès de la Secrétaire Générale de l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes.
Pourquoi choisir le service public ? C’est de cette question dont il nous a parlé dans cette interview.
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Mon parcours est plutôt éclectique. En effet, j’ai travaillé à la fois dans le secteur public (en collectivité territoriale, au Parlement, au sein d’une autorité administrative indépendante aujourd’hui), dans le secteur privé marchand (à l’AFNOR notamment) et dans le secteur privé non marchand (au sein de fédérations sportives). Parallèlement, j’ai aussi travaillé à différents niveaux, du local à l’international.
Ce choix assumé d’agréger différentes expériences m’a permis d’apprendre beaucoup, me conférant une lecture plus précise des enjeux de notre époque, des organisations et du service public. Par ailleurs, si ma formation initiale est le management des organisations, le fil rouge de mon parcours professionnel est la chose publique, avec une spécificité en management de la qualité.
Je dirais que je suis un facilitateur. Je mets en place des méthodes et des outils transverses (en mode projet) ayant pour objectif d’améliorer le fonctionnement général de l’Autorité. Mon rôle peut prendre différentes formes à l’instar de l’élaboration de référentiels de bonnes pratiques, de mise en oeuvre d’audits d’auto-évaluations, d’analyses sectorielles ou d’animation de groupes de travail.
J’ai l’intime conviction que ce qui motive le plus un agent ou un salarié, c’est la plus-value qu’il peut apporter dans une chaîne de valeur ; sa capacité, en somme, à être utile dans un écosystème. Dans le cadre de mes missions, avoir la possibilité de mettre de l’huile dans les rouages et de pouvoir mesurer la progression des actions installées est ce qui me motive le plus.
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Dans une société de défiance vis-à-vis des élus et de sentiment d’abandon, la finalité contributive des services publics au bien commun apparaît à la fois noble et plus que jamais nécessaire. La crise des gilets jaunes qui s’est exprimée a pointé le sentiment de relégation lié à la dégradation de services publics. Aujourd’hui, c’est notre contrat social qui est éprouvé et le consentement à la démocratie fragilisé. Dès lors, je crois que travailler dans le secteur public revêt une forme d’engagement, en faisant le choix d’adhérer à ses valeurs et d’œuvrer en faveur de l’intérêt général. Dit autrement, il y a ce sentiment de participer à quelque chose qui nous dépasse et de pouvoir y contribuer modestement, à son niveau, en proposant des solutions.
Je crois que travailler dans le secteur public revêt une forme d’engagement, en faisant le choix d’adhérer à ses valeurs et d’œuvrer en faveur de l’intérêt général.
Enfin, le service public est également émancipateur car il offre une multitude de possibles et de missions aussi diverses que passionnantes. Pour un agent, c’est une liberté de choix et de mobilité très précieuse.
Je dirais d’abord la diplomatie, la rigueur ensuite. Une posture adaptée à la culture de l’organisation est pour moi la première qualité. Dans le cadre de ma fonction, je me mets en situation d’écoute permanente des agents. La clé réside dans leur implication volontaire que je dois organiser. Cela demande beaucoup d’humilité, de respect et une impartialité. La rigueur ensuite car je dois être en capacité d’apporter des solutions sur-mesure qui devront être utiles et surtout utilisées ! Si l’outil (ou la méthode) n’est pas conforme aux attentes, le risque est qu’il tombe en désuétude sitôt le travail de co-construction finalisé.
L’un des défis majeurs est la capacité à donner du sens aux politiques publiques tout en initiant une culture résiliente. Du côté des agents, les périmètres évoluent régulièrement et conduisent à des réorganisations parfois éprouvantes. Il est donc nécessaire d’accompagner le changement. En parallèle d’équipes formées et informées, cela passe par un management incarné, dynamique et bienveillant. Un cap doit être fixé par direction et se décliner de manière opérationnelle pour s’incarner avec cohérence dans les actions du quotidien.
Il est ainsi nécessaire d’accompagner le changement et d’arrêter une finalité claire. En parallèle d’équipes formées et informées, cela passe par un management incarné, dynamique et bienveillant.
Du côté des citoyens, les besoins évoluent avec un triptyque qui pourrait se résumer à plus de simplicité, plus de réactivité, plus de services. Face à cette évolution, la résilience n’est pas qu’un mot à la mode, elle traduit une façon de concevoir la fonction publique de manière plus souple. La mesure de la qualité de service permet précisément d’apprécier les écarts entre l’action d’une administration et les attendus des usagers.
A cela s’ajoute un autre défi : la capacité d’attirer et de mixer les talents tout en favorisant les mobilités internes et externes. La vraie richesse des organisations se trouve dans la diversité des compétences et la mixité des générations et des origines. Que ce soit dans la fonction publique ou le secteur privé, l’entre-soi et l’immobilisme sont nuisibles.
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Il y en a plusieurs mais je dirais la protection de l’environnement et le soutien aux populations. Ce sont des enjeux liés qui nous concernent tous. Très tôt, j’ai pris conscience de l’importance de préserver notre environnement et notre biodiversité. L’objet de mon mémoire de Master 2 était d’ailleurs axé autour du conditionnement de l’octroi des subventions à des équipements sportifs au respect de critères dits de « développement durable ». Le chantier est immense et suppose un changement de paradigme. Si des normes « supra » contraignantes sont nécessaires, cela se joue aussi au niveau local où les collectivités se trouvent être un échelon pertinent pour mettre en œuvre des actions très concrètes.
S’agissant du soutien aux populations, je crois que c’est par la coopération et l’empowerment que nous pouvons mieux accompagner celles et ceux qui en ont le plus besoin et réduire les inégalités. Si, dans le contexte français, nous sommes étouffés par l’inflation normative, il y a des pays pour qui certaines de ces règles seraient très utiles pour améliorer leur niveau de santé, lutter contre la corruption, définir des produits plus sûrs, développer des économies alternatives, etc.
C’est par la coopération et l’empowerment que nous pouvons mieux accompagner celles et ceux qui en ont le plus besoin et réduire les inégalités.
Lors de mon expérience à l’AFNOR, j’ai eu la chance de travailler en collaboration avec des pays émergents afin d’élaborer, par exemple, des normes leur permettant d’améliorer leur bien-être. J’ai ainsi pu mesurer le rôle essentiel du multilatéralisme et je pense que se recroqueviller dans un monde ouvert et interdépendant est non seulement contre-productif mais également contraire aux valeurs humaines et démocratiques.
J’ai travaillé à la fois dans le secteur public et le secteur privé. Le secteur privé peut également contribuer à l’intérêt général, je l’ai observé lorsque j’étais consultant auprès de collectivités territoriales. Quelle que soit l’activité ou le secteur, le plus important à mes yeux est de parvenir à donner du sens à notre action, avoir un rôle à jouer et naturellement pouvoir en vivre dignement.
Le livre d’Albert Camus « Le mythe de Sisyphe » m’a beaucoup inspiré car il suggère l’humilité et la distanciation à observer avec ce monde « absurde ». Donner du sens à un monde qui n’en a pas est une philosophie à laquelle j’adhère à condition de n’en faire ni un dogme ni une obsession !